Alors que d’importantes pluies s’abattent sur la Californie, l’un des plus hauts barrages des États-Unis traverse actuellement une crise sans précédent. Plus de 180.000 personnes ont été évacuées.
Sauf mention contraire, toutes les photographies sont issues du California Departement of Water Resources, qui gère le barrage pour le compte de l’État de Californie.
La situation à Oroville
Le barrage d’Oroville, situé dans le nord de la Californie, est actuellement soumis à une intense pression. Après des années de sécheresse, d’abondantes pluies sont tombées sur la Californie, faisant rapidement monter le niveau du lac de retenue.
Les barrages sont conçus pour gérer de telles précipitations. En particulier, ils sont dotés d’évacuateurs de crue, qui agissent comme des trop-pleins sur une baignoire : lorsque l’eau atteint un certain niveau, celle-ci se déverse pour protéger le barrage d’une rupture – qui serait catastrophique.
Le problème est que l’évacuateur de crue principal du barrage est endommagé. Et il a fallu utiliser un évacuateur d’urgence, qui s’est avéré bien moins robuste que prévu. C’est pour prémunir son éventuelle rupture (et non celle du barrage lui-même, qui n’est à ce jour pas menacé), que le 12 février les autorités californiennes ont demandé à plus de 180.000 personnes d’évacuer le bassin versant du barrage.
L’évacuateur de crue principal est endommagé
L’évacuateur principal du barrage d’Oroville est un long canal de béton, contrôlé par des portes. Il permet de déverser le trop-plein du barrage dans la Feather, qui coule en contrebas (et sur laquelle le barrage est construit).
Le 7 février, un énorme trou est apparu vers le milieu de cet évacuateur de crue en béton, le rendant virtuellement impossible à utiliser. Le problème est que compte tenu de la vitesse et des volumes d’eau concernés, continuer à utiliser l’évacuateur de crue générerait une énorme érosion, qui ne ferait qu’agrandir le trou.
Après des tests les 8 et 9 février, le trou a continué à croître, confirmant qu’utiliser l’évacuateur principal à pleine capacité causerait de sérieux dommages. Malheureusement, les fortes pluies ont continué, obligeant les opérateurs du barrage à devoir choisir : continuer à utiliser (et à endommager) l’évacuateur principal, ou utiliser un évacuateur d’urgence, en espérant que ce dernier soulage l’évacuateur principal. C’est cette seconde solution qui a été retenue.
L’évacuateur d’urgence est utilisé
Le 11 février, le second évacuateur de crue est entré en action. Il est de conception plus simple que le principal : il s’agit d’une digue en béton de 9 mètres de haut, située à quelques dizaines de mètres de l’évacuateur principal et que l’eau est sensée déborder. Une fois qu’elle a traversé la digue, elle s’écoule directement dans… le sol. Contrairement à l’évacuateur principal, qui emmène l’eau du haut du barrage vers la rivière par le biais d’un canal en béton, l’évacuateur d’urgence consiste en cette seule digue. L’intérêt d’avoir construit un canal de béton est d’éviter l’érosion du sol ; or, sans canal de béton, ce dernier s’est effectivement fortement érodé.
Toutefois, le 12 février il est apparu que les dégâts causés par l’érosion de l’évacuateur d’urgence étaient bien pires qu’escomptés. Craignant une rupture de l’évacuateur d’urgence pouvant générer une vague de plusieurs mètres de haut, les autorités ont alors fait évacuer une partie de la zone aval, demandant à plus de 180.000 personnes de quitter les lieux. La situation était d’autant plus préoccupante que l’érosion aurait pu endommager la partie haute jusqu’à présent intacte de l’évacuateur principal, le rendant possiblement inopérant et laissant craindre le pire pour le barrage lui-même (qui aurait pu déborder et se rompre).
Comme le niveau de l’eau continuait à augmenter, il a alors été décidé d’augmenter le début de l’évacuateur principal, malgré ses dommages et les risques qu’une telle utilisation lui faisait courir.
Heureusement, l’utilisation de l’évacuateur principal a permis de calmer la pression sur l’évacuateur d’urgence. Le 14 février, l’ordre d’évacuation est levé.
Où en est-on aujourd’hui ?
Maintenant que l’évacuateur d’urgence n’est plus utilisé, d’importants travaux de consolidation ont été lancés pour limiter les effets de l’érosion. Car d’importantes pluies sont encore attendues en Californie, laissant craindre que la situation de crise se répète.
L’évacuateur principal est lui aussi considérablement endommagé. Le trou est tellement important que l’eau est quasiment complètement déviée de sa partie basse vers les accotements en roche et terre à proximité, qui sont eux aussi fortement érodés. Malgré les dégâts, il reste opérationnel et continue à évacuer d’importantes quantités d’eau.
Un autre problème est que l’érosion génère beaucoup d’alluvions, qui s’entassent au pied de l’évacuateur principal et doivent être évacués pour ne pas former un second barrage qui ferait lui aussi peser des risques sur la région, notamment en cas de rupture.
Le barrage lui-même n’est pour l’instant pas en danger – ce qui est plutôt rassurant, car il mesure tout de même 235 mètres de haut.
Direct
La crise à Oroville n’étant pas terminée, je continuerai à mettre à jour cet article par le biais de ce Direct. J’essaierai notamment de continuer à poster de nombreuses photographies, pour illustrer son évolution.
Vous pouvez cliquer sur les flèches → pour accéder à la partie correspondante du Direct. Les dates correspondent aux dates de réouverture du Direct.
- 23 février 2017 : la cavitation a-t-elle causé l’arrachage du béton de l’évacuateur principal ? →
- 25 février 2017 : un point sur l’état du barrage. Les nouvelles sont plutôt rassurantes →
- 6 mars 2017 : la crise est terminée, mais les travaux (et les problèmes) sont considérables →
- Le niveau de l’eau a suffisamment baissé dans le barrage
- L’évacuateur de crue a été coupé, permettant d’inspecter l’état de ce dernier. Les dégâts sont considérables
- Les débris amassés au pied de l’évacuateur ont commencé à être enlevés. L’objectif est de nettoyer le lit de la rivière, pour permettre à la centrale électrique de redémarrer (et donc de drainer le barrage en cas de besoin)
- Toutefois, en aval les berges de la rivière ont commencé à s’effondrer, ce qui va aussi nécessiter de gros travaux de remise en état